Une transaction n’est pas une charge professionnelle déductible

Une transaction n’est pas une charge professionnelle déductible

Juin 2022 - Les sanctions et amendes ne sont généralement pas déductibles. Pas même si elles sont liées à l’activité professionnelle. Cette non-déductibilité a été introduite afin de ne pas diluer l’effet de la sanction. Les transactions semblaient toutefois ne pas être soumises à cette règle. Mais les choses changent en 2022.

Le principe général

La non-déductibilité des amendes est décrite comme suit dans le Code des impôts sur les revenus 1992. Sont non déductibles : les amendes, y compris les amendes transactionnelles, les amendes administratives infligées par des autorités publiques, même lorsque ces amendes n’ont pas le caractère d’une sanction pénale et même lorsque leur montant est calculé sur la base d’un impôt déductible, les confiscations et les pénalités de toute nature.

Même lorsqu’un travailleur encourt une amende et que l’employeur la paie, l’amende n’est pas déductible.

Cette non-déductibilité doit toutefois être nuancée.
Les majorations d’impôt sont déductibles, à condition que l’impôt lui-même soit également déductible (par exemple, le précompte immobilier).
Les intérêts de retard sur les impôts et cotisations sociales sont également soumis au principe selon lequel l’accessoire suit le principal, où l’accessoire est l’intérêt de retard, et le principal l’impôt ou la cotisation sociale. Si l’impôt ou la cotisation est déductible, l’intérêt de retard est aussi déductible.
Sont également déductibles : les rétributions de stationnement, les amendes relatives à l’eurovignette, l’amende pour dépôt tardif des comptes annuels…
Les indemnités aussi sont évidemment déductibles, puisqu’elles n’ont pas le caractère d’une sanction.

Transaction

La transaction figure à l’article 216bis du Code d’instruction criminelle (C.i.cr.), lequel a été modelé par la loi sur la transaction financière. Cette loi sur la transaction financière offre une possibilité d’extinction de l’action publique moyennant le paiement d’une somme d’argent.
S’agit-il d’une sanction ?

La Cour d’appel de Gand a jugé fin 2020 que ce n’était pas le cas. Selon la Cour, il suffirait de se référer aux principes généraux en matière de déductibilité des dépenses. Dans l’affaire portée devant la Cour, un contribuable avait payé une transaction pour lutter contre une atteinte à sa réputation. Cette dépense était donc destinée à conserver des revenus imposables, de sorte qu’elle était déductible.

Intervention législative

La réaction ne s’est pas fait attendre. Fin 2021, une interdiction de déduction des transactions a été introduite dans la loi en question. Ne sont désormais plus déductibles : les sommes d’argent visées à l’article 216bis C.i.cr.

Selon le Conseil d’État, il n’a jamais été dans l’intention du législateur de faire exception à la non-déductibilité pour les transactions. Selon les membres du Conseil, la loi concernée n’était pourtant pas une loi interprétative. Une disposition est considérée comme interprétative lorsqu’elle clarifie une disposition existante. Cela implique que la modification apportée n’est pas une véritable modification, mais qu’elle reformule en des termes plus clairs ce que le législateur a voulu dire en réalité. Une disposition ou loi interprétative est dès lors applicable à partir de l’entrée en vigueur de la disposition interprétée. Et donc avec effet rétroactif.
Or, ce n’était pas le cas en l’espèce.

La mesure ne vaut donc pas pour le passé.
La loi a été publiée au Moniteur belge du 31 décembre 2021 et est entrée en vigueur dix jours après sa publication, soit le 10 janvier 2022.
Cela signifie que la question de la déductibilité des transactions conclues avant cette date reste entière. Le contribuable argumentera en effet que la non-déductibilité ne s’applique qu’à partir du 10 janvier 2022, et donc pas avant. Le fisc, quant à lui, argumentera que le Conseil d’État dit clairement qu’il n’était pas dans l’intention du législateur de rendre la transaction déductible. Le juge qui sera saisi d’un tel dossier devra donc délibérer avec toute la sagesse qui sied à sa fonction.