Immeuble commun : déduction des frais relatifs à la partie professionnelle

Immeuble commun : déduction des frais relatifs à la partie professionnelle

Janvier 2023 - Lorsqu’un indépendant utilise un immeuble commun à des fins professionnelles, les frais et amortissements doivent être limités non seulement à la partie professionnelle, mais ensuite aussi à la part qu’il détient dans la propriété. Les immeubles faisant partie d’une communauté matrimoniale bénéficient d’une tolérance administrative particulière.

Double limitation ?

Si vous utilisez un immeuble à des fins professionnelles, les frais (dont les amortissements) sont déductibles. Si vous n’utilisez cet immeuble que partiellement à des fins professionnelles, la déductibilité des frais est évidemment limitée à la partie professionnelle. Mais ce qu’on oublie parfois, c’est que la déduction doit ensuite encore être limitée à votre part dans la propriété, si vous n’êtes pas propriétaire, mais seulement copropriétaire de l’immeuble.

Exemples

Imaginons qu’en tant que salarié, vous aménagez une chambre d’étudiant qui représente 5 % de votre habitation. Vous êtes propriétaire de l’habitation avec votre partenaire. Si vous prouvez vos frais réels et que vous déduisez les amortissements, l’amortissement est limité à 5 % de votre moitié de l’habitation…

Imaginons que vous exploitez une entreprise dans une habitation ordinaire avec un partenaire commercial. Vous utilisez tous les deux l’habitation à 100 % à des fins professionnelles… Vous avez donc tous les deux droit à la moitié de la déduction des frais. Sinon les frais seraient déductibles à 200 %...

Imaginons que vous êtes propriétaire d’une habitation avec votre frère. Vous avez le rez-de-chaussée où vous exploitez un commerce, tandis que votre frère habite à l’étage du dessus, mais n’a rien à voir avec le commerce… Dans ce cas, il est tout aussi logique que les frais relatifs à l’habitation ne soient déductibles que pour moitié.
Et si vous n’utilisez pas le rez-de-chaussée entièrement à des fins professionnelles (vous vivez, par exemple, dans les pièces à l’arrière du magasin), vous devez en plus limiter votre part à la partie professionnelle.

Une double limitation ? Oui.

Communauté de biens

Dans un mariage, il y a trois patrimoines : les patrimoines de chacun des époux, plus le patrimoine commun. Vous pouvez modeler quelque peu ce patrimoine commun à l’aide d’un contrat de mariage : vous pouvez limiter le patrimoine commun ou même carrément l’exclure. Dans ce dernier cas, on parle de séparation pure et simple des biens. Les biens appartiennent alors soit à un partenaire, soit à l’autre, soit aux deux partenaires en copropriété. La communauté de biens va un peu plus loin que la copropriété, parce qu’il y a confusion totale de la propriété.

Et que constate-t-on ? L’administration a toujours été d’avis que la double limitation visée ci-dessus (partie professionnelle x part de propriété) ne doit pas être appliquée si l’immeuble en question est un bien commun aux époux. 

Seule la limitation à la partie professionnelle doit en l’occurrence être appliquée. Si donc, en tant qu’indépendant, vous exploitez votre entreprise dans un immeuble qui fait partie d’une communauté de biens, vous ne devez pas tenir compte de la limitation à la partie professionnelle pour déterminer la déduction.

Une question parlementaire le confirme… ou pas

Le ministre fédéral des Finances a reçu une question concernant un travailleur qui commence à utiliser une partie de son habitation pour faire du télétravail. Et comme on pouvait s’y attendre, le ministre confirme que :
a) le télétravail ouvre droit à l’amortissement de l’habitation ; et
b) la double limitation est d’application.

Ce qu’il ne confirme pas, c’est le point de vue administratif selon lequel aucune limitation de la propriété ne s’applique aux immeubles qui font partie d’une communauté de biens.
Faut-il en tirer des conséquences ? La question posée concernait une affaire concrète dans laquelle les partenaires n’étaient pas mariés. Ils étaient donc copropriétaires. En réalité, la question n’était donc pas de savoir si la tolérance existait toujours.

D’un autre côté, force est d’admettre que la tolérance administrative date quelque peu. Une différence de traitement entre personnes mariées et cohabitants (légaux ou non) constitue une discrimination qu’aucun juge n’admettra.

La question est donc de savoir si le ministre a délibérément ou inconsciemment évité la tolérance pour les biens faisant partie de la communauté matrimoniale...

Frais généraux vs spécifiques

Pour terminer, il convient certainement encore de préciser que la double limitation s’applique uniquement aux frais qui se rapportent à l’ensemble de l’immeuble. L’amortissement du prix d’acquisition ou du coût de revient de l’immeuble en est l’exemple le plus évident.

Les frais qui se rapportent spécifiquement à la partie commerciale de l’immeuble (comme le chauffage, l’électricité, l’aménagement...) sont évidemment déductibles à 100 %, parce qu’ils sont également professionnels à 100 %. La limitation à la part dans la propriété n’est en l’occurrence pas d’application.