Les salariés dans la nouvelle convention préventive
de la double imposition avec la France
Avril 2022 - Le 9 novembre 2021, la Belgique et la France ont signé une nouvelle convention préventive de la double imposition. Le texte de cette convention doit encore être adopté par le parlement. Une convention préventive de la double imposition détermine quel pays peut imposer quels revenus. L’ancienne convention entre la Belgique et la France date de 1964. En dehors d'une nouvelle numérotation détaillée, la nouvelle convention ne causera pas un grand bouleversement, mais il convient néanmoins d’être attentif aux changements.
Règle des 183 jours
La règle des 183 jours est une règle fixe qu’on retrouve dans toutes les conventions préventives de la double imposition. Lorsqu'un Belge perçoit un salaire en France, ce travailleur belge est en principe imposable en Belgique - son état de résidence. Si, par contre, le Belge séjourne également physiquement en France, la France (l’état de travail) pourra l’imposer.
Il existe une exception à cette règle - ce qui signifie donc que le travailleur belge sera imposé en Belgique – lorsque trois conditions cumulatives sont réunies :
1. Le Belge séjourne moins de 183 jours en France.
2. Le salaire n’est pas à la charge d'un employeur français.
3. Le salaire n’est pas à la charge d'un établissement stable en France.
La logique derrière cette exception est relativement simple : si le salaire constitue une charge déductible en France, il est logique que la France veuille également pouvoir imposer le salaire au titre de revenu.
La règle ci-dessus s’applique de la même manière au Français qui vient travailler en Belgique.
Quoi de neuf ?
La règle des 183 jours (point 1 ci-dessus) existait déjà dans l’ancienne convention, mais les 183 jours sont à présent calculés différemment : dans l’ancienne convention, le calcul s’effectuait par année civile. Une personne qui séjournait en France du 2 juillet 2020 au 29 juin 2021 respectait la règle des moins de 183 jours de l’ancienne convention. Dans la nouvelle convention, le calcul s’effectue par période de 12 mois. Si donc un travailleur part en France le 2 juillet 2020, on examine donc le 2 juillet 2021 combien de jours au total il y a séjourné.
La règle des 183 jours est déjà appliquée de cette manière dans d’autres conventions préventives de la double imposition récentes.
Une autre nouveauté est que salaire doit être payé par un employeur ou au nom d'un employeur qui n’est pas résident de l’état de travail (point 2 ci-dessus). Auparavant, il fallait en effet que le salaire soit à la charge d'un « employeur belge ». Il suffit à présent que cet employeur ne soit pas un employeur français. Dans l’ancienne convention, la règle des 183 jours ne s’appliquait pas au Belge qui travaillait en France pour le compte d’un employeur allemand. Dans la nouvelle convention, elle lui est applicable.
La troisième règle – le salaire ne peut pas être à la charge d'un établissement stable de l’employeur dans l’état de travail - a simplement été reprise de l’ancienne convention préventive de la double imposition.
Entrée en vigueur
Le processus parlementaire d’adoption d'une convention fiscale est difficilement prévisible. En Belgique, il faut en effet que l’État fédéral mais aussi les Régions marquent leur approbation. Qui plus est, ce type de document ne constitue généralement pas une priorité législative, même si parfois, lorsque l’importance du document le requiert, cela peut tout de même aller vite. De manière générale, on peut s’attendre à ce que la nouvelle convention préventive de la double imposition avec la France entre en vigueur le 1er janvier 2023.
Cela vous laisse encore un peu de temps pour déterminer en tant qu’employeur si la convention aura un impact sur vos travailleurs. Songez au Belge qui travaille temporairement en France pour le compte d’un employeur allemand : ce dernier pourra subitement bénéficier de la règle des 183 jours, alors qu’il ne le pouvait pas auparavant. Il faut assurément examiner et calculer s’il est judicieux d’attribuer le pouvoir d'imposition à la Belgique en appliquant les conditions de la nouvelle règle des 183 jours, ou si, au contraire, il est plus intéressant d’éviter de le faire.
Enfin, il ne faut pas non plus perdre de vue que ce qui précède s’applique également aux résidents français qui viennent travailler en Belgique. La nouvelle convention doit être examinée attentivement surtout par les groupes de sociétés qui ont des établissements dans les deux pays et qui font régulièrement traverser la frontière à leurs travailleurs.