Rupture de contrat et TVA
Rupture de contrat et TVA
Juillet 2021 - Les indemnisations de dommages ne sont pas soumises à la TVA. La TVA n'est en effet due que sur le prix payé pour la livraison d'un bien ou pour la prestation d'un service. L'indemnisation d'un dommage n'en fait pas partie... ou du moins pas toujours.
Les indemnisations de dommages sont exclues du champ d'application de la TVA
Les instructions de l'administration fiscale sont claires : " Une indemnité accordée à la suite d'un dommage réellement subi n'est pas (...) la contrepartie d'une opération imposable. Cette indemnisation se limite à réparer le dommage ou à sanctionner la non-exécution d'une obligation.
Il ne peut y avoir de TVA exigible sans fait générateur, à savoir la livraison effective d'un bien ou la prestation effective d'un service ".
Le fisc lui-même donne une série d'exemples de telles indemnisations de dommages.
L'acompte payé par le client d'un hôtel : l'acompte n'est pas la contrepartie d'une prestation de services (il n'est pas la contrepartie de la réservation et le séjour à l'hôtel n'a pas encore eu lieu). Si le service (le séjour) est presté, l'acompte est déduit du prix. En cas d'annulation, l'hôtelier conserve l'acompte. Aucune TVA n'est due sur cet acompte.
En cas de rupture d'un contrat d'entreprise, la partie de l'indemnité qui couvre le manque à gagner de l'entrepreneur n'est pas soumise à la TVA. La partie de l'indemnité relative aux services déjà prestés ou aux biens déjà livrés est quant à elle évidemment soumise à la TVA.
L'indemnisation de dommages est soumise au même régime TVA que la prestation de services
Les exemples tirés du commentaire TVA renvoient tous à des situations où le dommage découle du fait que l'une des parties ne respecte pas sa part du contrat.
Mais il y a également des contrats qui laissent littéralement aux parties le choix d'exécuter le contrat pour une contrepartie déterminée... ou pas, mais dans ce cas, en échange d'une indemnité.
Si cette indemnité pour non-exécution est prévue au contrat, peut-on encore parler d'une indemnisation de dommages ?
La Cour de justice a déjà laissé entendre à plusieurs reprises qui si le contrat laisse une possibilité de choix au client, les conséquences TVA ne peuvent être influencées par ce choix.
Contrats de télécommunications
En 2017, la Cour de justice de l'Union européenne a ainsi jugé dans une affaire portugaise qu'une indemnité pour rupture anticipée d'un contrat de télécommunications était bel et bien soumise à la TVA. En cause, les clients pouvaient bénéficier d'un tarif plus avantageux à condition de rester clients pendant une période déterminée. En cas de rupture anticipée, une indemnisation d'un montant fixe était due. Cette indemnité n'était pas des moindres : le fournisseur de télécommunications avait droit au même montant que celui qu'il aurait perçu si le client n'avait pas résilié le contrat anticipativement. Et la Cour a estimé que cette " indemnisation " ou " amende " était soumise à la TVA. La Cour a ainsi voulu éviter l'application d'un régime TVA différent selon que le contrat est exécuté jusqu'à son terme ou pas.
Dans une autre affaire, la Cour de justice de l'Union européenne est allée encore plus loin. Il s'agissait également de contrats de télécommunications dans lesquels les clients s'engageaient pour une période minimale. S'ils ne respectaient pas le contrat, une indemnité était due qui correspondait aux coûts que le fournisseur de télécommunications aurait pour la période en cours. Donc pas le prix total comme dans l'affaire portugaise, mais uniquement une indemnité pour les frais. Dans cette affaire également, la Cour a jugé que l'indemnisation est soumise à la TVA parce qu'elle doit être considérée comme la contrepartie d'une prestation de services.
Votre clause pénale
Ces arrêts semblent avoir deux facteurs de rattachement.
L'indemnité couvre au moins le " dommage " subi par le prestataire de services.
L'indemnité est fixée forfaitairement suivant des critères déterminés.
Il semble donc que si vous n'avez repris aucune clause dans votre contrat, ou si l'ampleur du dommage causé par la rupture du contrat doit être établie, l'indemnité en question est véritablement considérée comme une indemnisation de dommages.
Si, en revanche, l'indemnisation est fixée forfaitairement, la Cour voit l'indemnité comme la contrepartie d'une prestation de services, qu'elle soit exécutée ou non.
L'option la plus sûre semble donc être de préciser d'emblée dans votre contrat si vous appliquerez la TVA à votre clause pénale ou pas. Dans ce cas, il n'y a plus aucune discussion possible.