Le travailleur paie pour sa voiture de société : conséquences multiples
Le travailleur paie pour sa voiture de société :
conséquences multiples
Juillet 2021 - Lorsqu'un travailleur se voit mettre une voiture de société à disposition, il est imposé sur un avantage de toute nature. Si ce travailleur paie une contribution pour cette voiture de société, cette contribution est déductible de l'avantage. Il semblerait en revanche que les frais que le travailleur prend personnellement en charge ne soient pas déductibles de l'avantage imposable.
Déductibilité des frais de voiture et avantages de toute nature
La déduction fiscale des frais de voiture est fortement limitée tant pour les personnes physiques que pour les sociétés. En résumé, la déductibilité dépend de l'émission de CO2 du véhicule.
Mais lorsque le véhicule est une voiture de société, sa mise à disposition donne naissance à un avantage de toute nature dans le chef du travailleur et la voiture de société constitue en réalité une rémunération. Et une rémunération n'est soumise à aucune limite en termes de déductibilité.
Imaginons, par exemple, que la voiture coûte 10 000 euros par an. Et imaginons que l'avantage de toute nature s'élève à 3 600 euros. Vous pouvez déduire l'avantage de toute nature des frais de voiture (il reste donc un montant de 6 400 euros). C'est sur ce montant que vous devez appliquer la limite de déduction. Nous partirons ci-après du principe que la limite de déduction est de 75 %.
Concrètement ? Dans votre comptabilité, les frais de voiture sont déduits normalement. Mais dans votre déclaration à l'impôt des sociétés, la partie non déductible de ces frais de voiture vient s'ajouter aux dépenses non admises. Le montant à reprendre en dépenses non admises serait en l'occurrence de 6 400 euros x 75 %.
La contribution du travailleur
Imaginons à présent que le travailleur paie une contribution mensuelle personnelle pour la voiture de société. Si, par exemple, il paie 50 euros par mois, soit 600 euros sur base annuelle, l'avantage imposable n'est pas de 3 600 euros, mais de 3 000 euros.
La question se pose alors de savoir quel montant il faut reprendre en dépenses non admises. 75 % de 6 400 euros ou 75 % de 7 000 euros (car l'avantage de toute nature imposable n'est plus que de 3 000 euros).
Cour d'appel de Bruxelles
Dans une affaire portée devant la Cour d'appel de Bruxelles en 2017, un employeur mettait une voiture de société à la disposition de son travailleur. Mais le travailleur payait le montant exact de l'avantage pour cette voiture de société. Le travailleur ne bénéficiait donc d'aucun avantage imposable.
Le fisc en a déduit que la limite de déduction des frais de voiture devait être appliquée au montant total. Il n'y avait en effet plus d'avantage...
Mais la Cour d'appel de Bruxelles n'était pas de l'avis du fisc.
La Cour a considéré que la limite de déduction s'applique dans le chef de celui qui doit supporter les frais. Autrement dit, dans la mesure où c'est le membre du personnel qui supporte les frais (du fait du remboursement), c'est dans son chef que la limite de déduction des frais de voiture doit être appliquée, et non dans le chef de celui à qui les frais sont remboursés. Le fait que le membre du personnel ne déclare pas les frais est sans importance à cet égard.
Cour de cassation
L'affaire a finalement été portée devant la Cour de cassation. Et celle-ci a récemment statué dans le même sens que la Cour d'appel de Bruxelles. En fin de compte, seule l'utilisation professionnelle par la société est soumise à la limite de déduction. Dans la mesure où il n'y a pas d'utilisation professionnelle du véhicule dans le chef de la société du fait de l'octroi de l'avantage, il n'y a pas de limite de déduction.
Le fait que la société soit remboursée du montant exact de ces frais est sans importance pour la limite de déduction.
Le travailleur supporte personnellement des frais
Il y a également une discussion devant le tribunal de première instance d'Anvers qui, à première vue, n'était pas directement liée à la déductibilité des frais de voiture. En cause, une banque mettait une voiture de société à la disposition des membres de son personnel. Ces derniers étaient imposés sur cet avantage conformément aux règles d'évaluation habituelles.
Mais l'employeur déduisait du montant imposable toutes sortes de frais minimes que le travailleur payait lui-même, comme les frais de car-wash, les frais de remplacement d'un essuie-glace, les frais d'essence à l'étranger. Le travailleur ne payait donc pas de contribution personnelle, mais supportait certains frais. La question qui se posait était de savoir si ces montants pouvaient être déduits de l'avantage de toute nature forfaitaire.
Les contributions personnelles sont incontestablement déductibles. Cela figure tout simplement dans la loi. Mais la prise en charge de certains frais peut-elle être assimilée à une contribution personnelle ? Le fisc estimait que non et le tribunal d'Anvers a confirmé ce point de vue. Leur raisonnement est que les frais que le travailleur supporte personnellement ne font pas partie de l'avantage de toute nature forfaitaire et qu'ils ne peuvent par conséquent pas en être déduits.
Pas de contributions personnelles et donc pas d'impact sur les dépenses non admises
Bien que fiscalité ne rime pas avec logique, force est de conclure que les sommes que les travailleurs dépensent ainsi pour leur voiture de société ne peuvent non seulement pas être déduites de l'avantage imposable, mais qu'elles n'ont en plus aucun impact sur le montant des frais de voiture non déductibles.
Il n'y a plus qu'à attendre de voir si le ministre des Finances, dans le cadre de la réforme annoncée de la déductibilité des voitures de société, ne va pas tenter de contrer la jurisprudence favorable au contribuable par une nouvelle loi.